Comment avait-il pu ? Me faire ça ? A moi ? C'était un mec après tout. J'aurais dû me méfier dès que la passion nous avait enflammés. J'aurais dû me méfier de lui comme tout le monde m'avait toujours prévenue. L'amour peut faire mal. Si mal. Pourquoi ? Tant de questions qui restent sans réponses et qui polluent mon esprit. J'ai mal et je me sens seule. Lancée à 100km/h sur ces routes de campagne, je vois le paysage qui défile alors que les lueurs nocturnes commencent à faire leurs apparitions. Il est tard mais je n'ai pas eu le courage jusque maintenant de me lever de mon lit.
Cette photo me hante. Facebook quel réseau pourrit présent uniquement pour gâcher nos vies et nous rendre esclave. Qu'est-ce qui m'a pris d'aller sur le mur de cet homme que j'avais aimé pendant deux bonnes années et que j'avais quitté il y a seulement quelques semaines ? Quel pauvre imbécile ! Moi ou lui d'ailleurs ? Lui semblait alors mieux se tirer de notre rupture que moi. J'avais joué la fille forte, j'avais embrassé d'autres hommes le soir même après avoir mis fin à notre couple. Mais lui s'affichant avec une autre femme m'avait rendue folle et avait détruit cette image solide et imposante que je m'efforçais de créer.
Les paddocks rejoignirent alors mon champs de vision et je lâchai l'accélérateur. Les quelques chevaux qui broutaient, levèrent alors la tête au son du moteur et me regardèrent avant de retourner à leurs occupations. Un seul garda le port de tête en l'air et ses yeux noisettes se fixèrent avec attention sur la voiture. Je souris et des larmes coulèrent finalement sur mes joues. Je murmurai dans l'habitacle.
«Scarlet »Alors j'arrêtai complètement alors la voiture une fois cette dernière garée à l'orée de la barrière du pré. Je glissai à l'extérieur de l'engin et posai mes bras sur le bois. Je regardai l'alezan au bout du champs. Scarlet lui aussi continuait de me regarder. Je vis sa bouche mâchonner l'herbe qui lui restait et le soleil se couchait doucement derrière moi. Je refermais ma veste autour de mes épaules et inspira. Son indifférence me fit mal. J'avais tellement besoin d'une présence compatissante qui saurait m'écouter.
Je me jetai à l'eau et essayai de l'attirer vers moi. Cela allait contre tous mes principes. Moi qui aimait me faire désirer des chevaux. Leur rendre ce qu'il me rendait pour m'assurer qu'ils ne se pensaient pas dominants. Les inciter à me rejoindre plutôt que ce soit à moi de les rejoindre. Mais Scarlet était tout l'opposé et je devais faire avec.
« Aller vient cheval»Je claquai de la langue. Ma voix avait été un peu tremblante et j'avoue que je n'étais pas très confiante à l'idée de l'étalon viendrait me rejoindre. J'attendis quelques secondes puis j'entendis un souffle. Scarlet hocha de la tête et fit quelques pas en ma direction. Un sourire ravit mon visage et je pris de l'assurance.
« Vient ma grosse bouille ! Vient ! »Invité par mes paroles, Scarlet avança de plus belle, allongeant ses foulées alors qu'il remontait le pré afin de me rejoindre à la barrière. Sa tête se balançait de haut en bas alors qu'il marchait avec vivacité. Je sautais la barrière pour le rejoindre dans le pré et sa tête se posa avec force contre ma poitrine.
Alors je craquai. Toutes les larmes que je retenais depuis quelques heures déjà déferlèrent sur mes joues et je mis mes mains autour de l'encolure de l'alezannpour plonger mon visage dans sa crinière.
Nous restâmes ainsi quelques minutes avant que l'étalon ne décide de redevenir le cheval qu'il avait toujours été c'est-à-dire un étalon solitaire et fier. Il recula de quelques pas pour se défaire de l'étreinte et je souris. Scarlet resterait Scarlet.
Et en même temps j'aimais ce côté froid. Il ne me laissai pas m'apitoyer sur moi-même et me permettait d'aller de l'avant.
Je pris le licol de l'étalon et le dirigeai alors vers la porte. L'alezan me suivi la tête basse puis alors que j'ouvrais l'enclos, il tira fortement et parti au grand galop dans le champs. Ma main avait immédiatement lâché le licol et je regardai ma montagne s'élancer pleines balles dans le pré. Je me maudis : je devais faire attention avec lui c'était un jeune cheval avant tout.
Il se retourna et me regarda de ses yeux étincelants comme pour me défier. Sa tête était portée en hauteur et sa queue se relevait doucement.
J'avançai alors vers mon cheval après avoir fermé la porte. Et alors que j'arrivai presque à sa hauteur, il se dressa de toute sa hauteur puis vrilla pour repartir au grand galop dans le champ. Il lança les postérieurs et à nouveau me défia du regard.
Je commençai alors à courrir dans sa direction et il fit de même vers moi mais je levais les mains et il passa à côté de mon corps respectueusement. Une fois assez éloigné il jeta les postérieurs à nouveau.
Nous continuâmes encore quelques minutes à jouer au chat et à la souris dans le pré avant que je ne m'effondre sur l'herbe humide essoufflée. J'entendis alors les sabots de l'alezan avancer vers moi et je me redressa, aux aguets. Finalement il baissa la tête et la posa contre ma poitrine à la recherche de quelques câlins finaux. Je ne me fis pas prier. Scarlet m'avait fait tout oublier et surtout il m'avait redonné le sourire. Je posai un bisous sur son chanfrein soyeux et me redressai. Il était temps que je vive maintenant.
Et alors que je remontai le pré, l'étalon me suivi jusqu'à la barrière. Je le chassai gentillement. Il serait plus heureux en passant la nuit au pré. Il secoua la tête de haut en bas et s'en alla au pas alors que je sortai du pré et montai dans ma voiture.